Matte (Jacques)

Un article de la Mémoire du Québec (2022).

  • Avocat spécialisé en droit fiscal et en financement à l'étranger. Lorsque Jean-Alain Bisaillon veut trouver une façon de recevoir des sommes d'argent à l'abri de l'impôt, Matte lui propose le nom de Me Ivan Cohen, avocat de Genève qu' il a connu lorsque ce dernier travaillait à Montréal ; le 9 juin 1996, Matte reçoit un chèque de 1 245 532,83 $ fait à l'ordre de la compagnie du Marché Central Métropolitain Inc. par la Compagnie pétrolière Impériale Ltée e; le chèque sera endossé par Jean-Alain Bisaillon le 11 juin 1996 ; Bisaillon dépose le chèque dans son compte en fidéicommis ; à même ce compte, Matte verse 250 000 $ à Me Reevin Pearl pour assurer la défense de Me Jean-Pierre Cantin, 250 000 $ à Me Stéphane Sheitoyan pour assurer la défense de la compagnie du Marché Central Métropolitain Inc. et Jean-Alain Bisaillon, et 50 000 $ à l'étude Robinson, Sheppard pour que Me Claude-Armand Sheppard participe à la défense de Me Jean-Pierre Cantin ; Matte fait d'autres déboursés pour le bénéfice de Jean-Alain Bisaillon. Le syndic de la faillite de la compagnie du Marché Central Métropolitain Inc. intente une action contre Matte pour récupérer les 1 245 532,83 $ versé dans son compte en fédéicommis par Bisaillon ; le Barreau du Québec lui fournit un avocat parce qu'il prétend avoir agi selon les instructions du propriétaire de l'argent, Jean-Alain Bisaillon. Dans un règlement hors cour, une somme importante alors gardée secrète est payée au syndic de la faillite.

Dans un jugement rendu le 11 décembre 2007 par Marie Saint-Pierre, juge de la Cour supérieure du Québec, il est révélé que Matte avait payé 650 000 $ au syndic de la faillite du Marché central métropolitain et que cette somme provenait de fonds usurpés à une certaine famille Charron par des manoeuvres frauduleuses de Denis Charron, le fils de la famille, aidé de Matte ; lors de l'audition de cette cause, il est révélé que plusieurs faux documents avaient été fabriqués par Denis Charron avec l'aide ou à la connaissance de Matte ; la juge écrit que «Denis Charron et Jacques Matte ont posé des gestes fautifs, de mauvaise foi, de nature à tromper autrui et à le frustrer dans ses droits ou dans ses intérêts» ; en dédommagement des fautes graves qu'ils ont commises, la juge les condamne à rembourser environ 31,2 millions $ au patrimoine de la famille Charron ; cette décision est exécutoire nonobstant appel et les saisies avant jugement peuvent être exécutées. Matte et Charron interjettent appel de la décision de la juge Marie Saint-Pierre.
En 2003, la firme de financement Speedo appartenant à Ronald Chicoine est condamnée pour blanchiment d'argent.
En janvier 2008, le syndic du Barreau est saisi du dossier de Jacques Matte.
En 2008, la Société financière Speedo et son président Ronald Chicoine comparaissent devant les tribunaux sur des accusations d'avoir participé à l'émission de 40 M $ de fausses factures à des entreprises de construction.
Au début de 2008, le syndic du Barreau du Québec commence une enquête sur l'avocat Jacques Matte.
En juin 2009, la Sûreté du Québec-SQ effectue des perquisitions dans les bureaux de Jacques Matte, de la firme d'avocats Matte Bouchard de Westmount, et dans la résidence personnelle de Me Matte à l'Île-des-Soeurs ; les mandats de perquisition font suite à une enquête en matière de fraude et de recyclage des produits de la criminalité commencée au début de 2008 et impliquant Ronald Chicoine, un client de Me Matte ; L'opération policière est baptisée Opération Dorade.
En mai 2010, Ronald Chicoine est arrêté par la SQ dans le cadre du démantèlement d'un réseau de blanchiment d'argent et d'évasion fiscale ; Chicoine, président de la firme de financement Speedo aurait été la tête dirigeante de l'organisation ; il plaidera coupable aux accusations de fraude, de participation à une entreprise criminelle et de blanchiment des produits de la criminalité et sera condamné à 45 mois de prison en plus de rembourser 25 M $ en impôts impayés aux gouvernement fédéral et provincial ; dans cette opération, la SQ a gelé 48 M $ de fonds, le plus gros blocage de son histoire ; le réseau de Chicoine envoyait les sommes d'argent provenant du crime organisé dans des sociétés coquilles en Europe, notamment en Suisse ; les documents saisis sont scellés par la Cour parce que Jacques Matte, l'avocat de Chicoine, conteste le droit de la Couronne d'y avoir accès en invoquant son droit au secret professionnel.
En août 2010, la Cour d'appel confirme la décision de la juge Marie Saint-Pierre à l'effet que Matte a participé à une fraude de plusieurs millions de dollars et ordonne que Matte et son client Denis Charron remboursent 16 millions $ + intérêts depuis 2001 aux entreprises de Claude Charron, le père ; l'argent ayant été rapatrié de Suisse au Canada, la Cour d'appel statue que les 2 immeubles (400 et 440 René-Lévesque Ouest) sont la propriété du créancier hypothécaire Manioli Investissement qui, selon la Cour, avait agi de bonne foi dans cette affaire. Un autre tribunal se penche sur les perquisitions dont Matte a fait l'objet en 2009 dans une affaire de blanchiment d'argent.
Le 27 août 2010, dans un geste exceptionnel qui fait suite au jugement de la Cour d'appel, le Barreau du Québec demande qu'une plainte disciplinaire soit immédiatement portée contre Jacques Matte.
Le 21 septembre 2010, Jacques Matte démissionne du Barreau.
Le 4 avril 2011, la Cour suprême du Canada refuse d'entendre l'appel de Jacques Matte et de Denis Charron établissant ainsi de façon définitive le droit de propriété du créancier hypothécaire Manioli Investments sur les immeubles des 400 et 440, boulevard René-Lévesque Ouest, et, confirmant indirectement le jugement de fraude à l'endroit de Denis Charron et Jacques Matte.
Le 5 mars 2012, Jacques Matte est arrêté et accusé de fraude, de gangstérisme, de recel, de recyclage de produits de la criminalité, de fabrication de faux et de complot ; il aurait fraudé pour plus de 12 millions $ entre 1996 et 2009 en créant des compagnies coquilles à l'étranger enfin d'aider ses clients à ne pas payer les charges fiscales reliées aux activités de prêt de la Société financière Speedo ; Serge Perrier, 42 ans, de Saint-Eustache et André-Ronald Comeau, 74 ans, de Sainte-Marguerite , Jacques Stalman de Londres et Regis Dini de Suisse doivent répondre aux mêmes accusations. Le ministère public reproche à Matte d'avoir monté une structure d'entreprise qui a permis à la Société financière Speedo d'éluder 12 M $ en impôts entre 1996 et 2009. Libéré sous caution constituée d'un dépôt de 25 000 $ et d'une hypothèque judiciaire de 75 000 $ sur son condo de l'Ïle-des-Soeurs à Verdun ; il ne pourra pas déménager, ne pourra pas quitter le Canada et devra remettre son passeport et il ne devra pas communiquer avec toute personne en lien avec la Société immobillère Speedo.
En janvier 2013, Me Matte est condamné à trois ans de pénitencier.
Le 23 août 2013, les ex-avocats Jacques Matte et André-Ronald Comeau et l'ex-comptable Serge Perrier plaident coupable aux accusations qui pesaient contre eux. Perrier est condamné à 3 mois de prison en plus des 52 mois qu'il purge à la suite d'un premier volet de l'affaire.
(La Presse, 18 février 2015, page A13)


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